Sa vie et son parcours n’ont été jalonnés que de rencontres fortuites. Encore faut-il savoir transformer les essais. Laurent Artufel, l’homme pluriel, a su les mettre à profit. Autant acteur, magicien, animateur (télé et radio), que journaliste, RP ou producteur, il a toujours pris plaisir à jongler de l’une à l’autre de ses compétences. Cette diversité est une force. Jacques Martin l’avait compris. Il était lui aussi un arc à plusieurs cordes. C’est donc lui qui met les pieds à l’étrier au jeune marseillais. Laurent a vingt ans, des rêves plein la tête. Il a quitté ses calanques natales pour tenter sa chance à Paris. Ça semble lui réussir. Le pionnier du divertissement télévisuel le révèle dans son émission « Sous vos applaudissements » ; des ovations dont l’originaire de La Bouilladisse va se nourrir, se délecter jusqu’à en faire son « moteur » , son adrénaline.
L’impulsif ingénieux côtoie des personnalités, connait la notoriété, embrasse le succès sur scène, découvre le monde de la nuit ; un milieu galvanisant qui entraîne le provincial dans son tourbillon. Laurent l’audacieux, découvre Paris et ses travers, devient un papillon de nuit attiré par les strass et les paillettes. Il passe d’une soirée mondaine au carré VIP d’un club branché. Mais tel Icare, le noctambule jet-setter, l’oiseau de nuit aux étoiles plein les yeux va se bruler les ailes. « J’étais dans la place – ou en place (…), mais certainement pas à ma place ». Un parcours fait d’illusions, de plaisirs artificiels et surtout de déboires et de désillusions.
L’animateur le plus sexy de la télé qui se croyait « Nec pluribus Impar » (« au-dessus de tous ») va tout perdre du jour au lendemain. « Le bateleur » comme le nommait Catherine Ceylac, sans doute trop sûr de lui, est subitement « HS, hors-jeu ». Lui qui a rencontré Elie Kakou, Carlos, Gilbert Bécaud, Robert Hossein, Nathalie Baye, Véronique Sanson, Pierre Perret et même la grande Céline Dion…, lui qui a travaillé sur Voltage, M6, Pink TV, France 2, Direct 8, lui, le touche à tout populaire à qui presque tout réussissait, son Game is over. Il fait rimer décadence avec déchéance. Son cercle d’amis se réduit comme peau de chagrin. Il se retrouve dos au mur, face à sa crise d’identité. « À courir partout, je ne suis finalement allé nulle part. Enfin, c’est ce que je ressens aujourd’hui, c’est ce qui alimente ma fameuse crise de la quarantaine. Une crise d’identité déclenchée par cette impression d’en avoir déjà eu mille ! » Monsieur désespoir lui tient désormais compagnie depuis, notamment que celui qui partageait sa vie et qu’il était sur le point d’épouser l’a quitté.
Le voici aux portes d’une traversée du désert. La dépression batifole avec lui et déclenche des crises d’angoisse qu’il tente de soulager via un placebo fait de Lexomil et d’alcool. Laurent sombre et s’enlise. Il tente même de se suicider, lui, qu’un accident de voiture, avait déjà fait flirter avec la mort. Tel un électrochoc, il prend alors et enfin conscience de son égarement, de l’importance de reconsidérer ses priorités et de se tourner vers l’essentiel. Il lui faut comprendre comment il en est arrivé là et expier ses fautes. C’est son salut. L’erreur n’est-elle pas humaine et le pardon n’est-il pas divin ? Justement, ce besoin d’absolution va le conduire à prendre du recul à l’ombre des projecteurs, bien loin du monde médiatique, là où personne ne l’attend ni ne le connaît. Rien de mieux qu’un endroit spirituel pour faire le point et se recentrer. Sa retraite auprès de moines lui permet de se retrouver. À nouveau, l’éternel enfant peut arborer son beau sourire malicieux et de l’ombre, revenir à la lumière.
“Les plus gentils ne sont pas ceux que vous croyez” par un très attachant Laurent Artufel. Une biographie toute en délicatesse à travers des souvenirs racontés avec humilité et sincérité et des confessions intimes livrées telles que des excuses. Mais de s’acquitter de quoi ? D’avoir voulu toucher les étoiles et d’en être revenu ? Aux éditions Jets d’Encre.
Visuels : (C) : DR/Service de presse
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