Marche des fiertés : des milliers de personnes défilent à Paris
Organisée à la veille du premier tour des élections législatives et après “une campagne anti-trans sans précédent”, la marche des fiertés a rassemblé plusieurs milliers de personnes à Paris, avec pour mot d’ordre la lutte contre la transphobie.
Une foule jeune s’est rassemblée dès la mi-journée, au niveau de la porte de la Villette, un quartier populaire du nord de la capitale, en reprenant dans une ambiance festive des slogans tels que “Votons pour nos droits”, “Mets des paillettes dans ta vie”, “La lutte, c’est ma fierté”, et “Contre la transphobie : transolidarités !”.
Comme chaque année à cette période, plusieurs défilés ont lieu, en France et dans le monde, pour défendre les droits des personnes LGBT+. Mais savez-vous pourquoi ?
Témoin du mélange entre aspect militant et festif, les marches ont des mots d’ordre relatifs aux enjeux politiques du moment (le droit au mariage et à l’adoption, la procréation médicalement assistée…). Mais les cortèges sont ponctués de DJ, de chorales ou de chars, et on y vient souvent à plusieurs pour s’y retrouver. A Paris, un concert gratuit est organisé à l’arrivée de la manifestation. Dans d’autres villes, des événements culturels comme des festivals de cinéma ou des expositions s’ajoutent aux manifestations.
Les marches des fiertés à travers le monde, communément organisées au mois de juin, commémorent les émeutes de Stonewall, survenues à New York en juin 1969.
Le 28 juin 1969, dans un bar new-yorkais nommé Stonewall Inn, fréquenté par de nombreuses personnes homosexuelles, transgenres, drag queens et prostituées, une descente de police vire à l’affrontement. A l’époque, ces opérations des forces de l’ordre sont “assez courantes, dans un contexte de répression policière envers les personnes LGBT+”. Ce soir-là, les policiers qui pénètrent dans l’établissement trouvent face à eux une foule qui ne se laisse pas faire. “Ceux qui avaient été arrêtés ont commencé à protester ; nous, on s’est mis à jeter des objets, des pièces, tout ce qui nous passait sous la main, sur les voitures de police. On ne s’était pas du tout concertés, mais cette fois-ci, on s’est dit : “Ça suffit”. Le face-à-face se transforme en émeute, qui se poursuivra durant cinq jours. Après ces affrontements, de nombreuses organisations de défense des droits LGBT+ naissent outre-Atlantique.
En France, “la première apparition dans l’espace public d’homosexuels et de lesbiennes se revendiquant comme tels remonte au 1er mai 1971”, des militants du Front homosexuel d’action révolutionnaire (Fhar), un collectif de gauche radicale né dans la lignée des mouvements protestataires de mai 1968, font irruption dans le défilé du 1er-Mai organisé par les syndicats.
Durant les années 1970, le militantisme LGBT+ se développe et “des groupes de libération homosexuels (GLH) font leur apparition dans une trentaine de villes en France”. Finalement, le 25 juin 1977, la première marche autonome d’homosexuels et de lesbiennes est organisée dans la capitale, en soutien au mouvement LGBT+ américain qui, derrière le député Harvey Milk, dénonce des lois discriminatoires. L’ancêtre de la marche des fiertés parisienne ne rassemble alors que quelques centaines de personnes.
Pourtant, les personnes LGBT+ continuent de subir différentes formes de discriminations, n’ont pas encore acquis l’intégralité des droits qu’elles revendiquent partout dans le monde et voient même certains acquis remis en question, rappellent les associations. “Le fait d’être hétéro ne pose pas de problème pour obtenir un logement ou un emploi et n’est pas susceptible d’entraîner une agression dans la rue”, égrène Anne-Lise Ceran, de l’association Nosig, qui assure que “tant qu’il n’y aura pas d’égalité complète, on continuera à défiler”.
Ce dernier mot d’ordre était d’ailleurs inscrit sur la banderole en tête de cortège alors que les organisateurs de cette édition 2024 entendaient dénoncer une offensive transphobe.
“Jusqu’à présent on souffrait d’ignorance, maintenant c’est une haine directe”, a jugé Anaïs Perrin-Prevelle, directrice d’OUTrans en conférence de presse, ajoutant qu’”en 2024, on a connu une campagne anti-trans sans précédent”.
Organisée à la veille du premier tour des élections législatives, la marche des fiertés est également l’occasion de slogans ou prises de parole politiques.
“La ‘pride’, c’est la fête, mais avant la fête c’est l’émeute, la colère, dans un contexte social et politique très grave”, a lancé Mimi, coprésidente de l’association de soutien aux personnes trans Acceptess-T.
Chars colorés, ballons en forme de licorne, cœurs ou boules à facettes, concert de percussions ou bus à la londonienne de l’association Act-up, le cortège rejoindre la place de la République pour le concert, avec en têtes d’affiche Eddy de Pretto, Bilal Hassani, Desire, Louïz ou encore la drag queen Piche.
Si ces manifestations ont d’abord éclos dans les grandes villes américaines, puis occidentales, elles ont aussi gagné certaines capitales du reste du monde et, parfois, des territoires plus ruraux. En France, on compte quelque 80 marches des fiertés organisées en 2024.
Elles se tiennent majoritairement dans des grandes villes, mais se déroulent aussi dans des communes de moins de 10 000 habitants comme Ancenis (Loire-Atlantique), Saint-Martin-d’en-Haut (Rhône) ou Tignes (Savoie). Ces dernières années, des rassemblements ont même eu lieu dans certains villages, comme à Molines-en-Queyras (Hautes-Alpes), Saint-Laurent (Lot-et-Garonne) ou Chenevelles (Vienne), qui accueille depuis 2022 une marche des fiertés rurales.
Selon une source policière, les autorités s’attendent à un nombre de participants élevé entre 50 000 et 80 000 personnes.