Festival de Cannes: « L’HISTOIRE DE SOULEYMANE » le Prix du Jury – un certain regard
Comment rester indifférente à un tel film ?
« L’histoire de Souleymane », un film qui sonne et qui résonne juste !
Programmé dans la série Un certain Regard qui révèle souvent les talents de demain, ce film a obtenu à juste titre, le Prix du Jury.
Qui plus est, il est magistralement filmé par Boris LOJKINE, réalisateur français dont on a déjà entendu parler (Prix du public au Festival international du film à Locarno).
Et avec des acteurs au top !
Et tellement vrais !
Le jury de la section Un certain regard ne s’y est pas trompé en décernant à Abou SANGARE, l’interprète principal, le prix du meilleur acteur.
Il suffit de connaître la situation de la plupart des sans-papiers en France pour constater combien le réalisateur a su filmer au plus près et sans pathos la vie « au jour le jour » et heure après heure d’un clandestin contraint d’affronter, seul, toutes les vicissitudes de la vie dans un pays étranger. Les nuits dans les foyers, les galères, l’exploitation au travail. Et toujours le même obstacle : impossible de se plaindre. Comment se rendre à l’hôpital ou à la police lorsque on est en situation irrégulière ? C’est trop risqué !
Souleymane travaille ou plus précisément « sous-loue » une application de livraison de repas ; il ne compte pas ses heures et pourtant, il est sous-payé. L’engrenage se met en marche : sans argent il ne peut pas bénéficier des conseils nécessaires à la régularisation de sa situation. Et le temps presse : ce jeune Guinéen est convoqué 48 heures après par l’OFPRA pour un entretien duquel il résultera l’obtention ou non de l’asile politique…
A la manière d’un reportage – bien qu’extrêmement bien filmé avec des images très bien cadrées- ce film est la preuve de combien Boris LOJKINE (agrégé et ancien enseignant de philosophie) issu du documentaire, possède l’art de filmer au plus près ce véritable parcours du combattant vécu par tous ces hommes contraints de se soumettre à une économie souterraine faite d’injustice et d’exploitation.
Ce film se fait l’écho d’une réalité qu’un chiffre seul, suffit à illustrer : 55% du personnel employé dans le secteur de la restauration à PARIS est composé de « sans-papiers » qui, pour la plupart sont exploités et utilisés sans vergogne ; et qui travaillent souvent 12 heures par jour (sans compter les trajets) et 6 jours sur 7, exploités par des employeurs, qui, ô paradoxe, sont parfois eux-mêmes des compatriotes, pourvus, eux, du précieux sésame ! L’histoire de Souleymane évoque cette main-d’œuvre souvent qualifiée, qui se retrouve en France, démunie et corvéable à merci ! Une main-d’œuvre facile, qui bien entendu, ne connaît pas le sens du mot vacances…
Souhaitons que ce film aux multiples récompenses en obtienne une supplémentaire, à savoir la régularisation de la situation de son acteur principal Abou SANGARE, jeune garagiste de 23 ans qui travaille depuis 6 ans dans la ville d’AMIENS et à qui sa demande de régularisation vient d’être refusée.