Festival de Cannes: Jacques Audiard casse les codes avec Emilia Perez au festival
Une comédie musicale ébouriffante où elle incarne le chef d’un cartel mexicain qui change de genre. Cannes a trouvé sa Palme ?
Un passage mineur désormais oublié avec son nouveau film, « Emilia Perez », qui a secoué le Festival de Cannes en manque de grand film. Longues ovations, public conquis, journalistes qui crient déjà à la Palme d’Or évidente. La Croisette connait enfin son premier grand choc.
Jacques Audiard, voulais écrire un livret d’opéra, découpé en actes avec des personnages très archétypaux. Puis au fil des conversations avec Clément Ducol, le compositeur de la musique, ils avons migré vers le cinéma et la comédie musicale. Quant à l’origine de l’histoire elle vient du roman « Écoute » de Boris Razon. Dans son livre, il évoque l’histoire d’un narcotrafiquant qui veut devenir une femme. Mais il ne lui donne aucune suite.
Il trouve l’idée passionnante. La violence des pères disparaîtra-t-elle dans cette espèce de magie corporelle. Il y a une parole de chanson dans le film qui parle de : « changer les corps pour changer les âmes et la société ». C’est une hypothèse à envisager.
C’est après avoir repéré cette forte personnalité lors d’un casting en vidéo-conférence que Jacques Audiard va la rencontrer dans un restaurant parisien. Au départ, l’auteur d’Un Prophète songe faire jouer Juan à un homme et Emilia à une femme. S’il se laisse finalement convaincre d’engager une comédienne trans pour la seconde, c’est Karla Sofía qui va insister pour incarner les deux facettes du personnage.
Raconter son film, c’est déjà trop en dire. Car « Emilia Perez » est une sorte de résumé du meilleur du cinéma comme des thématiques actuelles. Qui embrasse un art tout en détournant tous les codes.
En choisissant d’adapter une histoire vraie relatée dans un livre de Boris Razon, Audiard tord le cou à toutes les attentes. Fait de son film un thriller haletant, une comédie musicale échevelée (la partition est signée Camille et Pierre-Marie Dru et les magnifiques chorégraphies de Damien Javelet), parle de genre, de résilience et de nature humaine, captive, émeut et fait sourire.
« C’est un cadeau magnifique que m’a fait Jacques », a confié la comédienne ce dimanche en conférence de presse, au lendemain d’une projection officielle où elle a pleuré à chaudes larmes sous les applaudissements. « Peu d’acteur ou d’actrice ont une telle possibilité dans leur carrière et je ne pouvais pas rater l’occasion. Je me suis plongée dans ce rôle, je suis allée au-delà des mes limites et il m’a fallu un exorciste pour en sortir. Mes proches peuvent en témoigner ! ».
On comprend en voyant le film que la présence de la star des ados Selena Gomez tient en fait de l’argument marketing (elle n’apparaît pas plus de dix minutes), le film est porté par un casting d’acteurs incroyables. Et en tête de liste, Zoe Saldana, impeccable et la grande révélation Karla Sofia Gascon, actrice transgenre espagnole, pivot et âme d’un film d’une richesse incroyable.
Jacques Audiard vient de placer la barre très haut dans la course à la Palme d’Or, au un prix d’interprétation pour Karla ça serait vraiment fort !