Réforme des retraites: journée de fortes tensions entre manifestants et forces de l’ordre
Jeudi, les cortèges ont rassemblé 452.000 manifestants selon le ministère de l’Intérieur, près d′1,7 million d’après la CGT, des chiffres en baisse par rapport au 17 décembre.
Le secrétaire général de la CGT, Philippe Martinez, à la pointe de la mobilisation contre la réforme des retraites, a dénoncé ce jeudi « l’attitude provocatrice » du gouvernement et a émis « des doutes » sur la volonté de ce dernier de « discuter », comme ses homologues de FO et de la CFE-CGC.
Quasiment toutes les villes s’inscrivaient en deçà de la jauge de la première journée de manifestations, le 5 décembre. De leur côté, les syndicats revendiquaient près de 1,2 million de manifestants dans 65 cortèges.
A Paris, environ 44 000 personnes étaient rassemblées, selon un comptage du cabinet indépendant Occurrence pour un collectif de médias – quand le ministère de l’intérieur annonce 56 000 personne et la CGT revendique 37 000 manifestants dans le cortège.
Les manifestants étaient 22 000 à Marseille, 14 000 à Toulouse, 11 000 à Lyon, 10 000 à Bordeaux ou encore 6 000 à Lille selon la police, soit moins lors des précédentes mobilisations du 17 et du 5 décembre.
Le 5 décembre 2019 est le point de départ d’une grande grève générale nationale interprofessionnelle illimitée prévue pour contester le projet de réforme des retraites mais également permettre de faire avancer les revendications de justice sociale, fiscale et climatique.
Le samedi 11 janvier 2020, une nouvelle journée de manifestations (à l’appel de l’intersyndicale) est prévue à Paris et dans toute la France.
Une manifestation est prévue à Paris à 13h30 de la Place de Nation à la Place de la République, en passant notamment par Bastille.
La manifestation pour les retraites sera rejointe par les gilets jaunes, à la suite de leur propre manifestation.
L’intersyndicale formée par la CGT, FO, la CFE-CGC, la FSU, Solidaires et des organisations de jeunesse appelle à de nouvelles actions les 14, 15 et 16 janvier pour obtenir le retrait de la réforme des retraites, a-t-elle annoncé ce jeudi 9 décembre dans la soirée à la presse.
“Nous appelons à préparer des actions pour les 14, 15 et 16, dont les modalités seront précisées samedi soir en fonction de la réussite du (samedi) 11”, nouvelle date de mobilisation interprofessionnelle, a indiqué Eric Beynel, porte-parole de Solidaires, après plus de quatre heures de réunion au siège de FO.
Au 37e jour de grève contre la réforme des retraites, le gouvernement a passé la journée de ce vendredi à rencontrer les syndicats et les organisations patronales, pour discuter de la conférence sur le financement du futur système de retraites. La nuit dernière, le gouvernement a a dévoilé les avant-projets de loi sur la réforme, qui seront présentés en Conseil des ministres le 24 janvier. Edouard Philippe a assuré que le texte n’est pas figé dans le marbre. Il pourra être modifié par amendements lors du débat parlementaire qui doit débuter le 17 février.
Édouard Philippe a pris la parole ce vendredi 10 janvier aux alentours de 18h30. « Nous avons bien avancé dans la recherche du compromis que nous souhaitons obtenir », s’est-il félicité.
« Demain, j’adresserai aux organisations syndicales et patronales des propositions concrètes qui pourraient être la base de ce compris », a annoncé le Premier ministre. Ces propositions porteront notamment sur les objectifs et les modalités de la conférence de financement « dont j’ai indiqué qu’elle paraissait être une excellente idée », a conclu le locataire de Matignon, réaffirmant une nouvelle fois la détermination du gouvernement à faire adopter cette réforme « avant l’été ».
Selon le gouvernement, » d’équilibre » permettrait de faire 3 milliards d’euros d’économies dès 2022 et 12 milliards en 2027. D’après un document remis aux partenaires sociaux lors des réunions de ce vendredi, pour un tiers (32%) des assurés, l’âge pivot décalera l’âge de départ de 62 à 64 ans, et un autre tiers (37%) ne sera pas touché (« inaptes, invalides, handicapés ») ou pas concerné (carrières longues, pénibilité, régaliens). Pour le dernier tiers (31%), l’âge pivot « joue positivement : ceux qui partent tard aujourd’hui peuvent partir plus tôt », selon ce document.
Laurent Berger, le leader de la CFDT après son entretien avec le Premier ministre. Il réclame toujours le retrait de l’âge pivot avant toute discussion sur le financement du système. « On a senti une volonté d’ouverture, mais tout ça se mesure in fine aux actes. Nous n’avons pas eu les réponses ce soir », a assuré Laurent Berger. « On attend un geste dans les jours à venir pour s’engager dans la conférence de financement sur la réforme », a-t-il insisté.
Le secrétaire général de l’Unsa, Laurent Escure, a lui aussi dit espérer que « dans les prochaines heures » Edouard Philippe retire l’âge pivot du projet de loi. « On a demandé au Premier ministre de retirer l’âge pivot (…), je crois qu’il a compris », a-t-il commenté. « J’attends que dans les prochaines heures, il y ait cette annonce », a-t-il insisté.
Yves Veyrier, le secrétaire général de Force ouvrière, a affirmé que la « détermination » de son syndicat à réclamer le retrait du projet de réforme des retraites restait « intacte ». « J’ai demandé à nouveau et cette fois très formellement au Premier ministre de faire une pause sur le processus pour qu’on revienne autour d’une table de négociation et qu’on examine précisément les conséquences de telle ou telle disposition », a ajouté Yves Veyrier. « Malheureusement, je n’ai pas compris de la part du Premier ministre qu’il s’inscrit dans l’idée de faire une pause ». « Nous ne ferons pas non plus de pause quant à notre détermination à faire en sorte d’empêcher que ce régime unique par points voie le jour parce que nous sommes de plus en plus convaincus qu’il est une erreur », a-t-il dit.
La CGT a également « redit son désaccord avec le projet du gouvernement ». Il s’est toutefois dit prêt à participer à la conférence de financement « en parallèle » avec la discussion parlementaire. « Il ne faut pas que cela soit déconnecté du projet de loi, il faut que cela se fasse en même temps », selon lui.
La CFE-CGC (cadres), François Hommeril, a aussi redit son opposition à « un projet inutile, dangereux, qui doit être retiré ». Avec cette réforme, « on aura le choix soit entre travailler plus longtemps ou gagner moins en retraite », a-t-il dit. Il a plaidé pour « remettre les bœufs avant la charrue c’est-à-dire le débat sur le financement et l’équilibre (du système) avant le vote du projet de loi à l’Assemblée ».
Le patron du Medef, Geoffroy Roux de Bézieux, soutient la mise en place en de l’âge pivot et a redit, ce vendredi, que pour lui, l’instauration d’une mesure d’âge est « absolument indispensable ».
Sur la même ligne, François Asselin, de la CPME, a déclaré : « Si on disait non, il n’y aurait qu’une seule solution: refiler la patate chaude aux générations montantes en augmentant les cotisations ».
Les manifestations du 9 janvier contre la réforme des retraites ont été marquées par les violences. A Paris et dans le reste de la France, des manifestants ont été blessés et d’autres ont été interpellés.
Cette journée de mobilisation n’a pas été de tout repos pour les manifestants, comme pour les forces de l’ordre. A Paris et dans divers cortèges, comme à Rouen ou encore Bordeaux, des tensions ont en effet éclaté. Pendant toute la durée de la manifestation, les forces de l’ordre ont fait usage de gaz lacrymogènes pour disperser le cortège.
L’intersyndicale a appelé à faire de samedi prochain “une journée de manifestations et de mobilisations massives”, au soir de laquelle elle doit de nouveau se retrouver pour décider de l’avenir du mouvement.
Dans l’attente, elle a indiqué son souhait de faire de mardi 14 une “journée de grèves et de convergence interprofessionnelles”, et annoncé des initiatives déclinées “sous toutes les formes” mercredi 15 et jeudi 16 janvier.